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D’un champ d’intérêt et d’exploration à un autre avec Jean-David Pelletier

Par Françoise de Montigny-Pelletier le .

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J’ai eu le plaisir, en mars dernier,  d’assister à la prestation de Jean-David Pelletier lors de la soirée «25 guitares en fête» à Saint-Eugène et d’échanger avec lui peu après.
J’ai découvert ainsi les 2 passions de ce jeune homme de Sainte-Perpétue, qui poursuit ses études à Chicoutimi depuis 5 ans. Il a accepté de nous confier ce témoignage avec beaucoup de sincérité et un brin de philosophie. Sa démarche personnelle inspirera peut-être les plus jeunes qui le liront et ravivera certainement émotions et souvenirs chez les autres!

Jean-David, depuis quand joues-tu
d’un instrument?

Durant une bonne partie de mon enfance (4 à 7 ans), j’avais beaucoup d’admiration pour mes cousins musiciens qui jouaient du Nirvana, Rage, etc. et qui animaient les «partys» de Noël du côté des Ouellet; mais j’étais trop occupé à courir dans toutes les directions en m’imaginant probablement que j’étais trop petit pour jouer avec eux. En parallèle, les «partys» du côté des Pelletier étaient plutôt folkloriques. Ils rassemblaient certains de mes grands-oncles qui jouaient des rigodons. Je me rappelle clairement que les reels joués à l’accordéon m’impressionnaient beaucoup. Parfois, entre deux rigodons, mon oncle Jean-Claude et mon oncle «Réguine» nous laissaient jouer avec leurs accordéons, mais je me rappelle que nos grands-tantes les chicanaient par peur que nous soyons trop brusques avec leurs instruments. En effet, à ce moment-là, je croyais que plus on poussait et plus on tirait fort sur l’accordéon, plus la musique était bonne, mais non. Plus le son était fort et plus vite on nous enlevait les accordéons des mains! Hi, hi!

Néanmoins, je continuais à vouloir en jouer. Voyant cela,  Jean-Claude me proposa de me donner quelques cours d’accordéon et même de m’en fabriquer un avec quelques morceaux qui traînaient dans son atelier. Ainsi, j’ai eu mon petit accordéon pour pratiquer chez moi. Nous nous rencontrions régulièrement dans son garage pour pratiquer. En plus, pour faciliter mon apprentissage, il se filmait dans son salon. J’éprouve beaucoup de plaisir en écoutant ces cassettes.

Quand as-tu eu enfin ta propre guitare?
J’ai eu ma première guitare à environ 12 ans. Les cordes étaient très éloignées du manche, environ 1 cm. Ouf! Pour s’endurcir les doigts, c’est l’idéal, mais je n’étais pas très persévérant.

L’année suivante, ma tante me fit découvrir le groupe AC/DC en m’emmenant voir un show au Colisée Pepsi. C’est là que j’ai eu la véritable piqûre pour la guitare. Wow! La danse particulière du guitariste Angus Young m’impressionnait tellement. Durant la même année, j’ai pratiqué, avec la guitare électrique d’un de mes amis, des morceaux d’AC/DC. Voyant cela, mes parents me donnèrent comme cadeau de fête l’opportunité d’aller choisir ma propre guitare électrique avec l’aide de mon cousin qui pouvait me conseiller assez bien! Wow! Nous avions un budget bien sûr à respecter, mais lorsque nous sommes entrés dans le magasin de musique, elle m’a frappé les yeux. Une SG « Epiphone » rouge qui était la reproduction parfaite de la guitare de mon idole à cette époque, Angus Young. C’est à ce moment que ma passion pour la guitare commença véritablement.

Quels sont tes coups de cœur en termes de style ou d’interprétation?
AC/DC puisque tout a commencé là pour moi. Cependant, mon véritable coup de cœur depuis les 10 dernières années est le style de Tommy Emmanuel. Ce guitariste australien hors du commun a une formidable présence sur scène, mais est surtout reconnu pour sa façon de jouer le « Finger Piking ». Ce style très coloré est ce qui m’a inspiré et fait vibrer depuis ces derniers dix ans.

Tu préfères interpréter, adapter ou composer?
Lorsque j’entends un morceau qui me fait vibrer, il me reste dans la tête très longtemps.  J’adore ensuite l’interpréter à ma façon. Comme mes seules bases théoriques musicales datent de mon secondaire un, je suis très dépendant de mon oreille et c’est ma principale référence aujourd’hui lorsque je tente de reproduire des morceaux de Tommy Emanuel, entre autres.

Tu as une guitare Boucher, depuis quand, pourquoi?
J’ai ma guitare Boucher depuis environ 6 ans et j’en suis énormément fier. J’y suis profondément attaché. C’est une « OM », un modèle idéal pour le « Finger Picking », et je sais que cette guitare fera un très, très long voyage avec moi. Comme les sorciers se font choisir par leur baguette magique, cette guitare m’a choisi, je crois! Hi, hi!

Es-tu plus stimulé quand tu joues en groupe pour arranger ou composer?
Puisque je joue surtout à l’oreille, j’adore accompagner et improviser lorsque je suis en groupe. Je compose, mais j’oublie au fur et à mesure. C’est lorsque je suis seul que je pratique plus rigoureusement de manière structurée. Avec le temps, je me suis rendu compte qu’il était plus facile de reproduire une chanson lorsqu’on s’en est tout d’abord imprégné dans notre tête.  J’aime avoir chaque petit détail dans la tête avant de pouvoir la jouer.

Nous avons remarqué un côté humoriste ou  «entertainer» mais peut-être pédagogue lors de ta prestation au Festival 25 Guitares en fête; tu aimes expliquer, faire comprendre, enseigner pour que les gens s’intéressent davantage à l’instrument?
J’aime beaucoup l’humour de Tommy Emmanuel lorsqu’il joue ses morceaux et cela m’inspire beaucoup lorsque je suis sur scène. Il sait mettre le public à l’aise. L’humour est pour moi une bonne façon de détendre l’atmosphère et nous permet de nous laisser aller.

Dans un autre ordre d’idée, qu’est-ce qui t’a poussé vers la géologie : la possibilité de poser des hypothèses, la recherche analytique, la perspective d’apporter des solutions, ou davantage le contact direct avec la nature, la matière comme telle?
À la fin de mon secondaire, je ne savais pas vraiment quoi faire. Par contre, j’aimais travailler à l’extérieur et j’aimais la musique. J’ai décidé de garder la musique comme passe-temps et d’aller étudier en géologie. Ça fait bientôt 9 ans que j’étudie cette matière et ma passion pour les sciences de la terre a grandi au même rythme que mon amour de la musique. Ces deux domaines me permettent de laisser aller ma créativité et ainsi de m’épanouir.

Si tu t’adressais à des plus jeunes ou à des adultes dans la vingtaine, que leur dirais-tu à propos du choix d’étude, de profession, d’orientation, hum, hum… sur la vie?
Comme je le disais précédemment, à la fin de mon secondaire, je ne savais pas vraiment quoi faire. Je ressentais une pression sociale qui me forçait à faire un choix de carrière. J’avais l’impression que tous mes amis avaient trouvé leur voie alors que moi, je me sentais très perdu. C’est une des raisons pour lesquelles j’étais moins motivé à l’école.

Je n’avais pas beaucoup confiance en moi et cela faisait en sorte que j’étais surtout le « suiveux de la gang». Le meilleur choix a été de lâcher prise, de prendre une chance et de me lancer seul dans un domaine que je connaissais à peine, la géologie. Il ne faut surtout pas avoir peur de l’inconnu (nouvelle région, nouveaux amis (es) et nouveaux domaines) puisque ce dernier est synonyme d’aventure. Cela m’a obligé à développer des côtés de moi-même que je ne soupçonnais même pas. Je crois que nous avons tous un instinct de survie, lorsqu’on a peur de l’inconnu, et peu importe la situation, il est toujours là pour nous inciter à développer notre confiance. J’ai beaucoup plus confiance en moi aujourd’hui.

Sortir de ma zone de confort (ma région, mon berceau) m’a aidé à développer plusieurs côtés de moi-même. Parallèlement, j’étais loin de ma famille, de mes amis et de mon chez-nous. Cet éloignement m’a permis de me rapprocher d’eux dans mon cœur et de réaliser à quel point j’aimais ma région natale. Chaque fois que je reviens y passer quelques jours, je suis enthousiaste et ça me plaît. Ce qui est sûr, c’est que même en étant loin, je me sens très proche de ceux et celles que j’aime.

Aujourd’hui, je vis à Chicoutimi et j’étudie toujours en géologie. Au fil des années, j’ai développé une passion pour cette science et celle-ci ne cesse de grandir. Cela me fait réaliser qu’il faut faire confiance à nos choix et que le fait de se lancer sans vraiment savoir nous amène à de belles choses. C’est en prenant des risques qu’on arrive à s’accomplir. Oser faire des choix lorsqu’on n’est pas sûr. Se faire confiance malgré une certaine insécurité.

Merci beaucoup, Jean-David, pour ce beau témoignage que tu acceptes de partager avec les lectrices et lecteurs du journal.

Photo à la Une : Jean-David en exploration géologique au pied d’un volcan dans le désert d’ATACAMA au Chili.

Guidées par l’œil du géologue et l’oreille du musicien, les mains de Jean-David font chanter sa guitare.